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  • Reportage

Les escaliers presque sans fin du mont Niesen

18.07.2025 – Stéphane Herzog

Les escaliers qui longent la ligne du funiculaire du Niesen, dans l’Oberland bernois, comptabilisent plus de 11’000 marches. Et le fait d’abriter le plus grand escalier du monde, est assurément un bon argument publicitaire, même si le public ne l’emprunte jamais. Quant à la fascination pour cette montagne, elle remonte au 18e siècle.

Plus haut, plus grand, plus rapide, plus beau? À la recherche desrecords suisses qui sortent de l’ordinaire. Aujourd’hui l’escalier du Niesen, le plus long escalier du monde avec 11’674 marches.

Le petit train rouge du Niesen, comme d’autres du même type, offre un espace un peu de biais. Il s’adapte ainsi à la raide montée qu’il gravit en direction du sommet du Niesen (2362m) dans l’Oberland bernois, un haut lieu du tourisme en Suisse depuis le 19e siècle. Divisé en deux tronçons, le parcours file presque tout droit. Il en va de même pour les escaliers qui grimpent à côté du funiculaire. Avec leurs 11’674 marches, ils composent le plus grand escalier du monde. C’est un bon argument publicitaire mais, évidemment, la quasi-totalité des visiteurs du Niesen – 84’000 personnes par année en moyenne – ne fournit d’autre effort pour rejoindre le sommet que celui de s’accrocher aux sièges quand le funiculaire grimpe. Le temps est loin où les premiers touristes montaient à pied, à dos de mulet et, pour les plus aisés, dans des chaises portées par des hommes! Ils dormaient dans la cabane posée au sommet en 1856. C’était avant le funiculaire, installé en 1910.

Absolument rectiligne et parallèle aux rails du funiculaire du Niesen: le plus long escalier du monde compte 11’674 marches. Photo Stéphane Herzog

En réalité, l’accès au fameux escalier est réservé à une élite sportive. Celle qui se réunit chaque année en juin pour fouler les marches en métal et en pierre du train du Niesen sur 1’669 mètres de dénivelé, le tout sur une pente de 68%. Contrairement à un sentier alpin, l’effort est abrutissant. Le record de vitesse se situe juste en dessous des 56 minutes. Soit une ascension de plus de 1600 mètres par heure, là où un marcheur en forme grimpe plutôt 500 mètres dans le même temps. Hors de cette compétition, l’escalier est une simple voie de service. Il doit rester accessible toute l’année, même en hiver. «Il est interdit d’y monter sans autorisation», rappelle la société anonyme Niesenbahn, sous peine d’amende. Mais il y a des exceptions! Un abonnement vendu 490 francs ouvre l’accès des escaliers entre trois heures et sept heures du matin, douche et descente incluses. Très rares sont les abonnés. Quant à votre serviteur, il avait prévu de fouler de nuit les escaliers depuis la station intermédiaire jusqu’au sommet, mais l’opération n’a pas été possible. «Nous ne cherchons pas de publicité supplémentaire pour l’escalier du Niesen», a expliqué Urs Wohler, le directeur du Niesenbahn.

Lever de lune

La «Revue Suisse» a donc fait le voyage en train! Au sommet, chaque visiteur fait face aux alpes bernoises, avec une vue plongeante sur les lacs de Thoune et de Brienz. Le regard porte jusqu’à la partie italienne des Grandes Jorasses. Par beau temps, on peut distinguer les Vosges et la Forêt noire, détaille l’écrivain et journaliste bernois Daniel Anker. La journée peut continuer avec une petite collation dans le restaurant du Niesen Kulm. On peut aussi passer la nuit dans l’une des charmantes chambres boisées de l’hôtel. L’occasion de contempler un lever de lune sur les alpes bernoises. Ce mont coche donc toutes les cases du tourisme suisse, pays qui séduit en premier lieu par la nature et les montagnes. D’ailleurs, l’attrait du Niesen est ancien, comme le prouve un guide publié en 1793 par le géologue allemand Johann Gottfried Ebel. L’ouvrage consacre quatre pages de son index au Niesen, contre une page et demie seulement pour le Titlis (UR), détaille Daniel Anker. «Le Niesen est l’un des premiers sommets suisses décrits dans la littérature», souligne cet alpiniste, âgé de 71 ans.

Pourquoi un tel succès? «Sa forme, pareille à un dessin d’enfant, est parfaite. Elle rappelle les pyramides de Gizeh», résume-t-il. L’après-midi, son ombre triangulaire se reflète alors sur le lac de Thoune, ajoutant un effet magique au panorama. Grâce à ces atouts, la «pyramide suisse» – le surnom du Niesen –, a attiré l’œil de nombreux artistes à commencer par Ferdinand Hodler et Paul Klee. Le mont a aussi fait l’objet de multiples gravures, qui ont rendu la silhouette de cette montagne familière dans le monde entier. Un aspect de ce succès est aussi pratique: la montagne peut s’observer facilement, de Thoune par exemple, alors qu’un sommet parfait comme la dent Blanche (VS), par exemple, reste caché depuis la plaine. Quant au trajet qui mène de Berne à l’Oberland, il s’agit de la voie touristique la plus ancienne de Suisse. «Avant le train, on allait vers le Niesen en calèche», rappelle Daniel Anker, qui a rédigé des monographies sur les plus grands sommets suisses. Aujourd’hui, le trajet vers le sommet depuis Berne dure moins d’une heure et demie.

Nuées de parapentes

Que faire au sommet du Niesen? On peut aller se détendre les jambes en longeant son arête ouest pour observer les départs de parapentistes. «Ce sommet est l’un des plus beaux spots de vol de la région», commente le Bernois Ruedi Thomi. Ce pilote de tandem, pionnier du parapente dans les années 1980, est venu faire un saut en direction de sa maison, située à huit kilomètres à vol d’oiseau. Non loin, nous croisons une jeune femme assise sur un banc, plongée dans la lecture d’un roman. Olivia Jundt a fait le voyage depuis Liestal (BL) et son mari est en train de voler. «J’étais très excitée à l’idée de découvrir la pyramide suisse et je me demande d’ailleurs bien pourquoi je vis à Bâle», rigole-elle. Sur le petit chemin goudronné qui rejoint le sommet depuis la gare d’arrivée du train, nous croisons une jeune femme asiatique qui s’agrippe nerveusement à la main courante. Nous sommes en montagne et il y a du vide! Plus haut, des Argentins apprécient la vue, tout en sirotant un maté. Mais en ce jour de mai, les touristes sont essentiellement des Suisses, ils constituent 95% des visiteurs.

Le Niesen a toujours inspiré les artistes. Le peintre symboliste Ferdinand Hodler (1853–1918), par exemple, a immortalisé plusieurs fois cette «montagne parfaite». Photo Keystone

Passagers clandestins des escaliers

Nous sommes descendus à pied jusqu’à la station intermédiaire de Schwandegg, située 700 mètres plus bas. La balade permet de s’approcher des fameux escaliers. Une petite musique métallique se fait entendre. C’est le cliquetis des câbles du funiculaire. Voilà un jeune qui fonce vers nous comme une locomotive. Il s’appelle Michaël Meyer et travaille comme boucher à Thoune. Notre coureur en est déjà à sa troisième montée aujourd’hui. Michaël vise un record: effectuer 186 ascensions du Niesen entre avril et octobre, quand les sentiers sont accessibles. Et la course sur les escaliers alors? Michaël officie comme bénévole lors de cette compétition, qui se déroule chaque année en juin. Mais grimper 11’000 marches n’est pas sa tasse de thé. Il préfère les sentiers. «Les escaliers, ce n’est pas sain» précise-t-il, citant à ce propos un précédent job comme agent de sécurité, où la routine le forçait à grimper des centaines de marches chaque jour. Le jeune homme sort son portable pour montrer des images de chamois. La montagne voit aussi passer des lynx, des aigles, des gypaètes, des vautours fauves et de tétras-lyres, rapporte le directeur du Niesenbahn. Il n’y a pas de bouquetins en revanche, malgré un projet de réintroduction de cette espèce lancé dans le massif du Niesen en 2006. Il s’agissait notamment de «réhausser l’attrait touristique de la région». Parmi les bipèdes, on trouve des passagers clandestins des escaliers. Michaël en a observé plusieurs, lors de ses 15 premières montées au Niesen cette saison, tôt le matin. Les personnes en question ont été vues sur les caméras du Niesenbahn, puis cueillies au sommet, rapporte le Bernois.

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Commentaires :

  • user
    Erna Lockhart, Australien 23.07.2025 à 03:38

    Dieser Artikel brachte wunderbare Erinnerungen zurück! Ich kam von Australia, machte Ferien in der Umgebung und wir sind auf den Niesen gelaufen. Ich war damals 70 Jahre alt, es war sehr anstrengend, fast zu schwer für mich. But the effort was worth it, so beautiful, it is a memory I keep in my heart but will not repeat…

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