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Les Suissesses entrent sur la grande scène du foot

11.04.2025 – Theodora Peter

Le football féminin est en plein essor. Mais la Suisse a du retard par rapport à d’autres grandes nations du foot comme l’Espagne, l’Angleterre ou l’Allemagne. Le Championnat d’Europe, qui aura lieu en Suisse en juillet, est censé donner de l’élan à la relève nationale

Quand les Suissesses disputeront le match d’ouverture de l’Euro contre la Norvège, le 2 juillet au Parc Saint-Jacques de Bâle, elles ne seront pas les favorites au titre. Mais elles feront tout de même partie des gagnantes: pour la première fois, l’équipe nationale jouera dans un stade suisse devant plus de 30 000 spectateurs. Certaines Suissesses connaissent déjà ce frisson, car elles jouent régulièrement devant un public nombreux dans les ligues féminines étrangères: c’est le cas, par exemple, de la capitaine Lia Wälti, sous contrat avec le prestigieux club anglais d’Arsenal, à Londres (voir «Revue» 5/2023).

Il y a quelques années encore, le football féminin en Suisse végétait dans l’ombre. Intéressant peu les médias et les sponsors, l’équipe nationale suisse jouait souvent dans de petits stades, devant quelques centaines de supporters. Depuis que la Suisse s’est vu attribuer, il y a deux ans, l’organisation de l’Euro féminin de 2025, et que l’équipe féminine a réalisé une belle performance à la Coupe du monde en Australie en 2023, l’intérêt du public s’est accru.

«On se fichait de ce que pensaient les gens. On voulait simplement taper dans le ballon.»

Franziska Schild, ancienne joueuse de l’équipe nationale

Autrefois moquées

La Bernoise Franziska Schild, fonctionnaire du football de 47 ans, a joué au plus haut niveau dans ses jeunes années et a été sélectionnée plusieurs fois en équipe nationale suisse au début du millénaire. Les conditions étaient alors encore très amateuristes, se souvient-elle: «Nous recevions un billet de train pour les trajets et deux paires de souliers de foot par année.» Les joueuses enfilaient les maillots usés de l’équipe nationale masculine, dans lesquelles elles flottaient désavantageusement. À l’époque, nul ne songeait encore à des maillots taillés pour le corps des femmes. Et le football féminin était parfois moqué. «Mais on se fichait de ce que pensaient les gens. On voulait simplement taper dans le ballon.»

Franziska Schild est une figure clé du développement du football féminin en Suisse. Elle dirige aujourd’hui la division féminine BSC Young Boys. Photo Daniel Rodriguez, AFBJ

Depuis, beaucoup de choses ont changé, y compris dans la promotion de la relève. Franziska Schild y a contribué ces dernières années en tant que responsable du développement du football au sein de l’Association de football Berne/Jura, qui, réunissant près de 190 clubs amateurs, est la plus grande association régionale de Suisse. «Pour inciter plus de petites filles à jouer au foot, il faut davantage d’offres qui leur sont exclusivement destinées», relève la fonctionnaire. En de nombreux endroits, les plus talentueuses s’entraînent avec les garçons, «et il est bon qu’elles puissent continuer de le faire». Mais de plus en plus de filles choisissent ce sport d’équipe parce qu’elles veulent jouer entre elles. Aujourd’hui, il existe déjà des championnats et des tournois féminins au niveau des juniors.

Au printemps, Franziska Schild mettra son expérience au service du club d’élite bernois BSC Young Boys (YB), où elle dirigera toute la division féminine. Même les clubs professionnels masculins ont reconnu le potentiel du football féminin. Il y a dix ans encore, la division féminine de YB était sur le point de disparaître. Aujourd’hui, le club investit 40 millions de francs dans la construction d’un campus pour la relève et pour les femmes.

«Notre objectif est de passer de 40 000 à 80 000 footballeuses juniores d’ici 2027.»

Marion Daube, directrice de l’Association suisse de football

L’Euro, un catalyseur

Sous le slogan «Here to Stay», l’Association suisse de football (ASF) entend tirer parti de l’Euro pour renforcer durablement le football féminin en Suisse. Actuellement, la part des femmes s’élève à 12 % sur les près de 340 000 joueurs licenciés que compte le pays. «Notre objectif est de passer de 40 000 à 80 000 footballeuses juniores d’ici 2027», déclare Marion Daube, directrice du football féminin à l’ASF. Une dynamique favorable semble déjà se mettre en place depuis que l’on sait que le prestigieux championnat aura lieu en Suisse. D’après Marion Daube, les expériences faites à l’étranger montrent qu’«un tournoi de cette importance agit comme un catalyseur, et permet de gagner jusqu’à dix ans dans le développement d’un sport».

L’ASF veut aussi doubler le nombre d’entraîneuses et de femmes arbitres et fonctionnaires. Mais pour cela, il faut des moyens supplémentaires. Le Conseil fédéral avait à l’origine prévu de limiter son soutien à l’Euro féminin à 4 millions de francs – des clopinettes par rapport aux 80 millions que la Suisse a investis dans l’Euro masculin en 2008. Après de vives protestations, le Parlement a finalement porté ce montant à 15 millions, dont une partie ira à la promotion du sport. Les villes et les cantons participants ont aussi promis de l’argent. Cela permettra de réaliser des investissements ciblés, par exemple dans des cours de formation pour les entraîneuses.

L’un des problèmes majeurs reste le manque de terrains pour s’entraîner. Ce qui met les clubs sous pression, d’autant plus que le nombre d’inscriptions augmente aussi chez les garçons. La promotion des filles ne doit pas se faire au détriment des garçons sur les listes d’attente, souligne Marion Daube. «Mais nous devons trouver des solutions pour offrir les mêmes chances aux filles.» Les clubs et les autorités ont pris conscience «qu’il fallait aller de l’avant, notamment en ce qui concerne les surfaces d’entraînement».

Marion Daube espère que l’engouement lié à l’Euro donnera encore plus d’élan au football féminin en Suisse. Elle ne s’attend pas à ce que la Nati remporte le titre. Le premier objectif, dit-elle, est de se qualifier pour les quarts de finale. «Pour l’équipe, pouvoir jouer dans son propre pays est déjà un grand honneur.»

Un championnat à domicile dans huit villes suisses

Le Championnat d’Europe de football féminin aura lieu du 2 au 27 juillet 2025 dans les villes de Bâle, Berne, Genève, Lucerne, Sion, Saint-Gall, Thoune et Zurich. 16 pays, dont la Suisse, pays hôte, seront répartis en quatre groupes et tenteront de se qualifier pour les quarts de finale, puis pour les demi-finales et la finale. Les favorites sont les Anglaises, championnes d’Europe en titre, ainsi que les Espagnoles, qui sont championnes du monde. Les villes hôtes organiseront des programmes-cadres pour les supporters qui viendront de toute l’Europe, avec des projections publiques. La mascotte du tournoi est une jeune chienne Saint-Bernard, nommée «Maddli» en l’honneur de Madeleine Boll, la première footballeuse licenciée de Suisse. Aujourd’hui âgée de 71 ans, la Valaisanne a conquis sa place dans ce royaume masculin en 1965, quand, à l’âge de douze ans, elle est entrée dans l’équipe masculine junior du FC Sion. (TP)

www.uefa.com/womenseuro

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